Marc-Aurèle,
l'antidote contre le Christianisme
"Que personne ne cherche son propre intérêt, mais que chacun cherche celui d'autrui." 1 Corinthiens 10.24. "quiconque d'entre vous ne renonce pas à tout ce qu'il possède ne peut être mon disciple" Luc 14-33 "Prêtez sans rien espérer" Luc 6-35 "Si
quelqu'un veut plaider contre toi, et prendre ta tunique, laisse-lui
encore ton manteau... Donne à celui qui te demande, et ne te détourne
pas de celui qui veut emprunter de toi." Matt 5-40/42.
L'abnégation de soi: "Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à lui-même" Luc 9-23 "ne pas placer notre confiance en nous-mêmes, mais la placer en Dieu" 2 Corinthiens 1-19 "ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes" 1 Corinthiens 5-15. Pour Pascal: “Le moi est haïssable".
le pacifisme suicidaire chrétien n'est pas sans rappeler les religions asiatiques de la non-violence, et de
l'amour compassionnel et universel (jainisme, bouddhisme...). Les juifs esséniens avait
subi ce type d'influence.
Jésus prétend donc dépasser la morale classique par des principes plus exigeants. Cela peut impressionner et a suscité la fascination. Mais tout cela pose de nombreux problèmes. Cette surenchère poussée jusqu'à l'extrême est-elle vraiment plus morale ?
Le
but fondamental de la morale est de permettre l'organisation de la vie sociale
sur Terre d'une manière qui respecte équitablement les chances de chacun au bonheur. En détruisant
le soi-en-ce monde et l'idéal de bonheur sur Terre, le christianisme détruit pas la même le but et l'objet même de
la morale. Sans un soi moteur, il n'y a plus non plus de point d'appui pour juger, et sans jugement il n'y a plus de moralité. Comme
la morale de Jésus nie l'objet et les moyens de la morale, cette doctrine
n'est pas une morale plus profonde, mais c'est simplement un extrémisme qui aboutit à des contradictions et des absurdités.
-> En
quoi mon intérêt réalisé par un autre pourrait-il être morale alors que
ce même intérêt servit par soi-même serait immoral ? Il n'y a rien
d'immoral à se servir soi-même, d'autant plus quand sa cause est juste.
De plus, d'un point de vue pratique, chacun est mieux placé
pour comprendre ses désirs que ceux des autres qui sont souvent
différents. Donc un autre n'est pas forcément à même de bien me servir.
Le christianisme amène à des relations humaines dysfonctionnelles.
-> S'oublier soi-même est impossible dans la pratique, d'ailleurs comme nous allons le voir plus bas les chrétiens qui se
rêvent au paradis se sont en fait très peu oubliés eux-mêmes. Ils demandent en fait seulement de
s'oublier dans ce monde qu'ils méprisent (en échange de la promesse du paradis) mais
donc ils ne se sont pas oubliés !
La critique d'Ayn Rand.
Wallace:
Christ, every important moral leader in man's history, has taught us
that we should love one another. Why then is this kind of love in your
mind immoral?
Rand:
It is immoral if it is a love placed above oneself. It is more than
immoral, it's impossible. Because when you are asked to love everybody
indiscriminately. That is to love people without any standard. To love
them regardless of whether they have any value or virtue, you are asked
to love nobody.
Ayn Rand (1959). "The Mike Wallace Interview of Ayn Rand"
-> Aimer son ennemi est
une contradiction dans les termes. Ce serait comme vouloir détester son
amour. Absurde ! Cela n'a juste pas de sens. On peut certes faire
l'effort de tolérer, de se réconcilier voir même après de pardonner à son ancien ennemi,
mais si on l'aime c'est juste que ce n'est plus son ennemi !
Dans la pratique, le pacifisme extrême de Jésus est inapplicable ou suicidaire quand il est
appliqué. "Si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l'autre." Tendre la
joue gauche et aimer
ses ennemis pendant qu'ils vous persécutent, n'opposer aucune résistance face à l'injustice en attendant l'action de la providence (Romains 12-19), peut au mieux faire naitre un sentiment de culpabilité chez un oppresseur doté d'une forte conscience morale (Gandhi), mais pratiquer ce pacifisme naïf est inefficace contre des barbares convaincus par une idéologie de destruction (Hitler).
Beaucoup reconnaissent que l'amour
chrétien n'est pas toujours praticable dans la réalité, mais conservent
une fascination pour cette utopie qui leur parait un idéal magnifique
même s'il est inatteignable. De la même façon, le communisme continue de fasciner une partie de ceux qui y ont renoncé.
Au contraire selon loi l'antihumanisme structurel de ces doctrines (que l'on interprète faussement comme un humanisme)
les rends fondamentalement méprisables (à propos de "l'antihumanisme théorique" du marxisme voir l'analyse d'Althusser). Je vais montrer ici que loin
d'être une simple utopie irréalisable, la morale chrétienne est une
dangereuse perversion dont les fondements conduisent en fait à
l'immoralité. Pour comprendre cela,
il nous faut pénétrer plus profondément la structuration psychologique
des sentiments moraux chrétiens.
Culpabilisation judéo-chrétienne. Toute cette surenchère dans l'application de la règle d'or vient
d'un désir religieux
d'élever la moralité qui provient lui-même d'un sentiment de
culpabilité décuplé par les malheurs des juifs qui ont été interprétés
par leurs
théologiens comme une perte de faveur divine. Ils recherchent donc à
calmer le courroux de leur dieu vengeur par une plus haute exigence
morale et un raffermissement de la foi
pour enfin
obtenir le pardon et échapper
à l'enfer. Jésus a en effet une conception théologique du monde. Il
voit dans les maladies, les infirmités des condamnations pour des péchés
(Marc 2-5/12).
Depuis,
Jésus le trouva dans le temple, et lui dit: Voici, tu as été guéri; ne
pèche plus, de peur qu'il ne t'arrive quelque chose de pire. jean 5.14
Or, afin que vous sachiez que le Fils de l'homme a sur la terre le
pouvoir de pardonner les péchés: Lève-toi, dit-il au paralytique,
prends ton lit, et va dans ta maison. Matthieu 9.6
Pour Paul de Tarse, "Israël, qui cherchait une loi de justice, n'est pas parvenu à cette
loi. Pourquoi ? Parce qu'Israël l'a cherchée non par la foi, mais par
les œuvres." Romains 9-31
Renan
"Il lui fallut un renouvellement complet, une révolution prenant la
terre à ses racines et l’ébranlant de fond en comble, pour satisfaire
l’énorme besoin de vengeance qu’excitaient chez lui le sentiment de sa
supériorité et la vue de ses humiliations" "Jamais Israël n’avait été
plus fidèle à la Loi, et pourtant on avait subi l’atroce persécution
d’Antiochus"
La
culpabilité est ainsi au cœur de la psychologie chrétienne primitive. La préoccupation
principale du chrétien de l'antiquité est d'expier ses fautes pour
gagner son paradis. Etablir la justice sur
Terre
ne fait pas parti de ses objectifs, d'autant qu'il croit que la fin du monde est proche, ce qui explique les
propos surprenants de Jésus sur l'esclavage, la guerre, les pauvres, l'hygiène...
relevés plus haut sur cette page. Pour le bonheur, Jésus s'en remet
totalement à la vie future:
Jésus et la haine du monde: "Je ne prie pas pour le monde" Jean 17-9 "Je ne suis pas du monde" Jean 17-14 "Mon royaume n'est pas de ce monde" Jean 18-36. Paul conclut donc "Si c'est dans cette vie seulement que nous espérons en Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes" 1 Corinthiens 15-19. "Jésus-Christ, qui s'est donné lui-même pour nos péchés, afin de nous arracher du présent siècle mauvais" Galates 1-4 ne savez-vous pas que l'amour du monde est inimitié contre Dieu? Celui donc qui veut être ami du monde se rend ennemi de Dieu Jacques 4:4. N'aimez point le monde, ni les choses qui sont dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est point en lui 1 jean 2:15
"Maintenant a lieu le jugement de ce monde; maintenant le prince de ce monde sera jeté dehors." 12.31
Le but de la foi est d'être délivré de l'emprise du "prince du monde" (expression désignant le diable), afin d'éviter d'être "condamnés avec le monde" 1 Corinthiens 11.32 le prince du monde vient. Il n'a rien en moi; Jean 14.30
"l’idée
que Satan est le dieu de ce monde s’enracinait chez eux de plus en
plus" (II Cor., iv, 4 ; Eph., vi, 12 ;
Jean, xii, 31 ; xiv, 30)"Nulle
part ne s’exprime avec autant de force le sentiment d’aversion pour le
monde qui fut l’âme du christianisme primitif. « Se garder immaculé du
monde » est le précepte suprême. « Celui qui veut être l’ami du monde
est constitué l’ennemi de Dieu. »" Renan
Être haï par le monde. Si le monde vous hait, sachez qu'il m'a haï avant vous. Si
vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui; mais parce que
vous n'êtes pas du monde, et que je vous ai choisis du milieu du monde,
à cause de cela le monde vous hait. Jean 15.18-19 Vous serez haïs de
tous, à cause de mon nom Matthieu 10-22
Ainsi si l'esprit de certains préceptes
évangéliques rejoignent la morale gréco-romaine ou tout simplement la morale universelle
et s'accordent aujourd'hui avec les objectifs de l'humanisme des
Lumières, la morale de Jésus ne permet pas d'instaurer le progrès et la
justice sur Terre. Jésus abandonne totalement ce combat. Déconnecté du monde réel, Jésus réclame une soumission totale à ses disciples et interdit
aux
hommes de juger, de combattre, de résister. La seule action dans ce
monde est de prêcher "la foi" pour être sauvé dans l'autre monde.
"Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés" Matt 7-1 Luc 6-37 "ne condamnez point" Luc 6-37. "Ne vous vengez pas vous-mêmes, bien-aimés, mais laissez agir la colère de Dieu" Romains 12-19
Le
pacifisme naïf des premiers chrétiens provient en fait d'un abandon du jugement moral de l'homme
à Dieu (Matt 7-1) et donc un abandon du monde au diable. Pour
Jésus ce n'est pas à toi humain de juger
mais Dieu seul à ce droit (l'épisode de la femme adultère que personne ne peut juger entre également dans cette logique). Tu n'as pas à te défendre, car ce serait
faire le mal et donc perdre ton paradis. Tu dois subir et te concentrer sur
ton seul bien moral personnel pour gagner ton
paradis, au mépris des conséquences terrestres.
La morale oublie les conséquences terrestres et devient seulement limitée à l'intention. On trouve une doctrine similaire chez Kant
qui réduit également la morale à l'intention, ce qui mène à des
aberrations dans des cas concrets montrés par Benjamin Constant (à propos du droit de mentir).
Critique païenne du monachisme.
"Je
me détourne avec douleur de ces rochers qui me rappellent un malheur
trop récent ; c'est là qu'un infortuné est venu se séparer de la
société pour s'ensevelir tout vivant. C'était un de mes amis, jeune,
d'une noble famille ; sa fortune, l'union qu'il avait contractée,
répondaient à sa naissance : poussé par les furies, il abandonna les
dieux et les hommes, et la superstition lui fait aimer l'exil dans une
honteuse retraite. Le malheureux : il se figure que les souillures du
corps sont agréables au ciel ; et il se soumet à des tortures que ne
lui infligeraient point les dieux offensés. Oui, je le demande, cette
secte n'est-elle pas plus funeste que les poisons de Circé ? Ils
n'avaient d'action que sur le corps, tandis qu'elle métamorphose les
âmes.
"Toute l’île, dit un ingénieux voyageur de ce siècle, est remplie ou
plutôt souillée par des hommes qui fuient la clarté du jour. Ils
prennent le nom de moines ou de solitaires, parce qu’ils vivent seuls
et ne veulent point de témoins de leurs actions. Ils rejettent les
richesses dans la crainte de les perdre, et pour éviter de devenir
malheureux, ils se livrent volontairement à la misère. Quel comble
d’extravagance et d’absurdité, de craindre les maux de cette vie sans
savoir en goûter les jouissances ! Ou cette humeur mélancolique est
l’effet d’une maladie, ou les remords de leurs crimes obligent ces
malheureux à exercer sur eux-mêmes les châtiments que la main de la
justice inflige aux esclaves fugitifs" Rutilius.
Belle analyse païenne qui voit dans le christianisme un délire
de culpabilité qui amène à l'autodestruction. La malfaisance des restes
de cette idéologie est encore visible chaque jour.
La Condamnation de cette Morale
L'égoïsme chrétien ! Nous voyons que la morale chrétienne (ou kantienne) est finalement un égoïsme pour obtenir son petit salut personnel (dans la fable de l'au-delà) au mépris de ses devoirs envers le
monde réel. C'est le salut de son âme et la menace superstitieuse de l'enfer qui obsède le
chrétien quitte à oublier l'ordre du monde et la vie sur Terre. Comme
mourir pour Christ offre la certitude du paradis (Luc 9-23 et Marc
8-35), ceci explique la
course fanatique des martyrs chez les premiers chrétiens (voir ci-dessus).
Ainsi au courage héroïque des gréco-romains pour maintenir l'harmonie du cosmos se substitue la détestation chrétienne du monde, qui est une des facettes de l'inversion des valeurs.
Une morale apocalyptique !
On ne peut pas dissocier la morale de Jésus de sa
croyance millénariste en l'apocalypse prochaine. Sa morale est incompatible
avec notre
survie, ni celle de la société, et Jésus en est en fait parfaitement conscient !
Il sait que les disciples qui se convertissent à sa doctrine vont hâter leur
mort. Aussi, je ne suis pas du tout convaincu par Jésus et sa morale. La surenchère suicidaire de Jésus
n'est donc en rien plus morale que l'ancienne morale païenne. En fait, elle l'est bien
plutôt moins ! Le toujours plus chrétien est en fait moins.
Se sacrifier volontairement en héro existait
largement dans
la morale païenne mais comme geste héroïque venant de soi (très loin donc de
l'égoïsme vulgaire) ; pas comme volonté de se détruire soi et
le monde qui sous cette forme chrétienne ne rend le sacrifice
aucunement moral, car inutile. Marc-Aurèle dit à propos de la mort "le fait d'être prêt doit parvenir d'un jugement propre et non, comme chez les chrétiens, d'une pure obstination"
Stoïciens contre Chrétiens: une morale de l'action conséquente contre une simple morale de l'intention. Une fois que l'on a compris l'état d'esprit des chrétiens de l'antiquité, on
comprend mieux pourquoi les stoïciens, qui bien que présentant des points de compatibilité importants avec la morale
chrétienne, ont cependant été révulsés par le
christianisme et l'ont combattu, dénoncé et même condamné (Marc-Aurèle, Rusticus contre Justin). Les stoïciens étaient préoccupés par l'harmonie du monde et de la
cité et ne pouvaient, avec raison, accepter la morale chrétienne, qui a conduit à la chute de Rome.
"Ce
n'est pas dans ce qu'il éprouve mais dans ce qu'il accomplit que se
trouvent le bien et le mal d'un être raisonnable et social, tout comme
la vertu et le vice ne sont pas pour lui dans ce qu'il subit mais dans
ce qu'il accomplit." Marc-Aurèle
Marc-Aurèle se voue à une vie difficile et consent à de multiples sacrifices personnels pour maintenir l'harmonie durement conquise du monde civilisé, sans escompter
aucune récompense post-mortem pour ses services: "Rappelle-toi
aussi par où tu as passé et ce qu'il t'a été possible d'endurer ; que
l'histoire de ta vie est désormais finie, et ta mission remplie ;
combien de beaux exemples tu as montrés ; combien de plaisirs et de
douleurs tu as supportés ; combien d'honneurs tu as négligés ; envers
combien d'ingrats tu as été bienveillant". Voilà pourquoi, la
moralité héroïque d'un sage antique surclasse selon moi sans mesure celles de
tous les martyrs et saint chrétiens uniquement préoccupés par leur petit salut personnel au paradis.
Le
salut personnel nécessite le courage héroïque de s'infliger à soi même
des efforts pour se discipliner et le salut du monde et de la
civilisation nécessite l'intelligence d'infliger parfois de la
souffrance aux autres quand c'est parfois nécessaire. Sans cela aucun
commandement militaire, aucune justice, aucune entreprise héroïque ne
peut fonctionner ou exister.
"la
patrie du Chrétien n’est pas de ce monde. Il fait son devoir, il est
vrai, mais il le fait avec une profonde indifférence sur le bon ou
mauvais succès de ses soins. Pourvu qu’il n’ait rien à se reprocher,
peu lui importe que tout aille bien ou mal ici bas." "Le Christianisme
ne prêche que servitude & dépendance. Son esprit est trop favorable
à la tyrannie pour qu’elle n’en profite pas toujours. Les vrais
Chrétiens sont faits pour être esclaves ; ils le savent & ne s’en
émeuvent guère ; cette courte vie a trop peu de prix à leurs yeux."
Rousseau, contrat social, IV, VIII.
culpabilisation de l'intention au détriment des résultats de l'action. l'enfer terrestre est construit par les bonnes intentions chrétiennes. Le soupçon journalistique d'une possible impureté dans l'intention fait
pression pour imposer des politiques chimère déconnectés des
réalités et aux conséquences catastrophiques. Voilà, la perversion
en permanence produite par la morale chrétienne dans toute sa
splendeur. L'optimum réaliste systématiquement remplacé par une chimère
complètement contre-productive et néfaste. la vraie morale c'est de rendre le monde meilleur. si c'est le détruire ou le rendre moins bon ce n'est pas morale. certes
me direz ce n'est pas l' intention du chrétien! mais c'est le résultat!
sortez de la morale de l'intention pour jugez le chrétien selon une
morale pragmatique de l'action !
L'immoralité de la doctrine de la grâce par la foi. La
déconnexion du chrétien avec le monde réel est encore accentuée par la
théorie du pardon accordée pour la foi seule indépendamment des œuvres réalisées.
"l’homme est déclaré juste par la foi,
indépendamment des œuvres de la loi" Romains 3.28 "[Dieu a] dit à
Moïse: Je ferai grâce à qui je veux faire grâce, et j'aurai compassion
de qui je veux avoir compassion. Ainsi donc, cela ne dépend ni de la
volonté ni des efforts de l’homme, mais de Dieu qui fait grâce." 9-15/16 "Or, si c'est par grâce, ce n'est plus
par les œuvres" 11-6
Jésus
accorde son pardon (la grâce du Père) à tous ceux qui croient en lui (ceux qui ont la foi en Dieu: Luc7-44) indépendamment de leur vertu (ou des oeuvres) ! Pour un gréco-romain, le pardon chrétien est donc complètement immoral !
La
vieille fable qui veut que les méchants vont en enfer et les bons au
paradis est morale. Par contre la théorie du salut par la foi des
judéo-chrétiens est immorale. C'est un abus produit par la tyrannie des
prêtres qui s'accaparent ainsi le pouvoir politico-judiciaire et réclament une obéissance aveugle à leur principe.
L'opposition entre païens et judéo-chrétiens ne porte donc pas sur la moralité en soi mais sur la foi/l'obéissance. De même, l'opposition débat entre la morale humaniste et la morale kantienne ne porte pas non plus sur la morale mais sur l'obéissance aveugle et irraisonnée à la loi. C'est l'obéissance aveugle (la défaite de la raison) que réclament les théologiens/kantiens ce qui leur donne tout pouvoir en échange de promesses imaginaires.
«
Sans la foi, dit Ambroise, les vertus ne sont que des feuilles que le
vent agite, parce qu'elles n'ont pas de fondement. Que de païens sont
sobres et miséricordieux ! Mais n'ayant pas la foi, ils ne portent pas
de fruits » « Combien de gentils, s'écrie Augustin , nourrissent ceux
qui ont faim , vêtissent ceux qui sont nus, reçoivent les voyageurs,
visitent les malades, consolent les prisonniers ! Beaucoup font toutes
ces oeuvres de miséricorde. Et cependant ils ne seront pas sauvés, ils
ne seront pas élus , ils seront perdus , anéantis » ( ) .
Ambros., in Psalm . I , 41 ( T. I , p. 757) . ) Augustin ., Enarrat. in Psalm . 33 , § 7.
Idem chez Maimonide dénoncé par Spinoza: "C’est là
justement le contraire du sentiment des Juifs : ils prétendent que les
croyances vraies et la vraie règle de conduite ne servent de rien à la
béatitude, tant que les hommes ne sont éclairés que de la lumière
naturelle et ne connaissent pas la loi révélée à Moïse. Voici les
propres paroles de Maimonide, qui ose professer ouvertement cette
doctrine (Rois, chap. VIII, loi 11) : " Quiconque reçoit les sept
commandements et les exécute avec zèle doit être compté parmi les pieux
des nations et les héritiers du monde à venir ; à condition toutefois
qu’il reçoive et pratique ces commandements, parce que Dieu les a
donnés dans sa loi et nous les a révélés par l’organe de Moïse, après
les avoir déjà prescrits aux fils de Noé ; mais s’il ne pratique les
commandements de Dieu que par l’inspiration de la raison, ce n’est plus
un habitant du céleste royaume, ce n’est plus un des pieux ni un des
savants des nations. "
Spinoza, Traité théologico-politique, V.
La morale théologique de Jésus n'est pas une morale humaniste. Deux conceptions de la morale s'opposent. La tradition humaniste basée sur le développement de l'amour de soi (Démocrite,
Marc-Aurèle, Spinoza) ou la conception opposée basée sur l'abnégation de soi (Jésus, Kant). La morale théologique (de l'oubli de soi) s'oppose à la morale humaniste (du souci de soi).
Contre la logique épicuro-spinoziste de la coopération de la morale et
du plaisir, la morale de Jésus reste dans l'opposition raison-passion propre aux théologiens. Jésus est dans la logique de la morale vécue comme une contrainte envers soi. Etre morale c'est cesser d'obéir à ses désirs. Kant fait même du plaisir une
objection à la moralité. Selon lui n'est moral qu'obéir à un commandement qui s'impose à moi et m'humilie. Pour
être morale, il faut renoncer à soi, à ses désirs, ses succès et ses possessions terrestres et se soumettre à la loi et s'abandonner dans la foi (la morale de Jésus).
Concevoir la morale comme une soumission à une autorité extérieure amène à demander plus d'effort et de constriction du
soi. La morale est vécue comme ce qui fait obstacle au soi
et on croit que plus on réprime le soi plus on est morale. En poussant cette logique à l'extrême, l'être le plus
morale est celui qui s'abandonne complètement lui-même. On arrive à la morale de
Jésus qui nous demande de tout abandonner.
L'humilité contre l'amour de soi. La
morale extrême de
Jésus apparait plus morale à beaucoup car elle demande encore plus de
sacrifice de soi. Cela renvoi au réflexe intuitif d'exiger des autres
qu'ils se limitent lorsqu'ils dépassent les bornes. Mais
le sacrifice de soi n'est pas un bon critère de moralité ! Les
terroristes kamikazes ne sont pas moraux. Ce sont juste des fanatiques.
Un bien meilleur
critère de moralité est la capacité
du soi à aimer des idéaux moraux et à effectivement avoir le courage et
la
volonté conséquente d'être soi-même une force qui les réalise dans ce
monde. Par exemple, l'humanitaire ou l'écologiste défend des idéaux
moraux et sociaux par simple élévation de son niveau de conscience et
ainsi de ses désirs, et pas d'abord dans une logique sacrificielle du
soi. Il est heureux de participer à un bel idéal.
Mais
enfermé
dans leur logique de soumission du soi, les théologiens dénoncent cette élévation du soi comme un simple produit
de l'orgueil qui se contemple lui-même (Malebranche contre Sénèque). Effectivement
le coeur de notre désaccord est là ! L'amour de soi est la source du
bien pour les païens alors qu'il est toujours mauvais pour les
chrétiens. Tout plaisir même fortement
intériorisé comme un idéal de la conscience n'est pas moral pour Kant. Au contraire pour Marc-Aurèle c'est Kant qui est immoral: "si tu fais le bien simplement par devoir, tu ne fais pas encore ce bien comme à toi-même".
Ainsi,
le terme "amour" est ambigu chez Jésus, et sert aujourd'hui à tordre la
doctrine en un sens humaniste trompeur. En vérité, l'amour promu par Jésus c'est
l'amour compassionnel, autrement la contagion de la souffrance et non sa résolution ! Pour Jésus, l'amour signifie l'humble soumission (à l'autorité de Dieu) et non le développement de la puissance du soi (et de sa vertu). Ce n'est pas un développement du soi mais un
renoncement à soi. Ainsi, il
n'y a pas de véritable amour du bien émanant de soi chez Jésus (c'est une soumission du soi), et pas de
réalisation effective du bien en ce monde (c'est un suicide collectif).
Devant l'échec de sa morale, incapable de créer la
concorde, Jésus en est réduit à s'énerver, à invectiver et à menacer...
Echec de la morale chrétienne.
Devait-on comprendre que la naïveté de Jésus venait d'une
confiance infinie en la bonté
cachée de l'homme qui serait révélée grâce à l'amour
chrétien et qui pouvait guérir le monde des excès de l'égoïsme et de la violence
? Encore une fois, ce genre de réinterprétation humaniste tardive du
message de
Jésus amène à des incohérences frontales avec ses propres paroles,
ceux des premiers chrétiens et de cette théologie ainsi qu'illustré au début de cette "page noire".
Pour le christianisme, le fond de l'homme n'est pas bon mais corrompu par le mal dès la naissance: c'est la thèse du péché originel (ou du mal radical chez Kant). De plus, le perfectionnement de soi et
du monde est incompatible avec sa doctrine de l'oubli de soi et le mépris du monde. La foi en Jésus n'est pas le développement d'une conscience morale
supérieure (comme
dans le stoïcisme) mais une soumission et une abnégation de soi qui
au final rend l'homme stupide et abrège sa vie. Le
christianisme n'a pas dépassé la sagesse païenne. Il lui est très inférieur.
Le contre-exemple de l'humanisme stoïcien: Marc-Aurèle l'antidote contre Jésus. Au contraire de Jésus, pour le stoïcien Marc-Aurèle, la sagesse ne se fonde pas sur un
antihumanisme :
« il m'est bien
permis de délibérer sur moi-même et il est de mon droit de rechercher
quel est mon intérêt » et il rappelle que « chaque homme, [...] s'aimant de préférence à
tous... » Pensées pour moi-même
la morale se fonde sur un perfectionnement du soi à travers le culte de la Raison:
"Creuse
au dedans de toi. Au dedans de toi est la source du bien, et une source
qui peut toujours jaillir, si tu creuses toujours" "que le Dieu qui est
en toi protège un être mâle, vénérable, un citoyen, un Romain, un chef
qui s'assigne à lui-même son poste" "Honore ce qu'il y a de plus
puissant dans le monde : c'est ce qui tire parti de tout et qui
gouverne tout. De même, honore aussi ce qu'il y a en toi de plus
puissant, et ceci est de même nature que cela, car c'est ce qui en toi
met à profit tout le reste et dirige ta vie" "renonces à tout le reste
pour ne plus honorer que ton principe directeur et ce qu'en toi il y a
de divin"
"Tu négliges inopportunément le don que t'as fait la nature, en tenant
compte de toute autre chose que de la raison" "ne se guider sur rien
autre, même pour peu de temps, que sur la raison" "En moins de dix
jours tu paraîtras un dieu à ceux qui maintenant te regardent comme un
fauve ou un singe, pourvu que tu reviennes aux principes et au culte de
la raison" "l'intelligence de chacun est Dieu et découle de Dieu" Pensées pour moi-même
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